Des objectifs européens pour le pilote alsacien Kevin Petit
Publié : 16 mars 2024 à 6h00 - Modifié : 19 mars 2024 à 8h37 par Sébastien RUFFET
Kevin Petit est prêt à en découdre lors de cette saison 2024 de courses de côtes
Crédit : @DR
La saison de courses de côte va bientôt débuter, et au sein du Sébastien Loeb Racing, Kévin Petit s'engagera notamment sur le championnat d'Europe.
Kévin Petit est un Alsacien d'adoption. Le natif de Bourgoin-Jallieu a trouvé son équilibre et son bonheur en Alsace depuis quelques années, dans une région qui a su le séduire et l'adopter. La passion pour la course sur route, les belles montées, l'adrénaline, c'est forcément quelque chose qui résonne pour le pilote qui a intégré une structure bien alsacienne, le Sébastien Loeb Racing. Pour cette année 2024, Top Music a décidé d'accompagner Kévin dans sa quête des sommets. Entretien, pour lancer la saison, dans nos locaux en ce début du mois de mars.
Top Music : En deux mots, qui es tu ?
Kévin Petit : J'ai 27 ans, je suis pilote pour le Sébastien Loeb Racing, et je suis engagé en championnat d'Europe de courses de côte au volant d'une voiture qui s'appelle la Revolt 3PO Décopeint, une auto qui fait 590kg pour 550 cv.
A quelqu'un qui ne te connaît pas, comment tu expliques ce que tu fais ?
En général, je commence en disant que je suis pilote professionnel, mais la course de côte, il faut l'expliquer. Donc brièvement : on part d'un point A pour aller à un point B le plus rapidement possible dans des cols de montagne, avec des véhicules qui n'ont rien à faire à cet endroit-là. On a tendance à dire dans le milieu que c'est la discipline la plus extrême, et j'aime l'entendre aussi parce que c'est vrai qu'on est une discipline assez particulière, courte mais assez intense.
Comment es-tu tombé dans cette discipline ?
Quand j'étais petit, j'accompagnais mon père et mon frère qui étaient pilotes. J'ai commencé à faire un peu de karting sur le tard à l'âge de 16 ans, et dès que j'ai pu les accompagner sur les manches françaises de courses de côtes, j'ai sauté dans le bain, et j'ai fait comme ça six ans de ma carrière avant de rejoindre le Sébastien Loeb Racing.
C'est quoi les grandes particularités de la course de côte ?
C'est que tu as un véhicule parmi ce qui se fait de plus rapide en compétition. C'est assez léger, et tu fais ça au milieu des rochers, des arbres, des rails, sur des routes pas souvent complètement adaptées, et avec des vitesses parfois assez folles : cette année, on aura des courses où on va pouvoir monter à 270km/h, toujours au milieu des rochers et des arbres... Il faut vraiment se préparer. Je dirais que c'est moins aseptisé que le circuit, on est plus proche du rallye mais avec des véhicules qui paraissent moins sécurisés puisqu'on a la tête dehors, avec des ailerons dans tous les sens.
Un mot sur ces voitures justement !
Il y a des véhicules qui sont vraiment créés pour ça. On travaille avec un constructeur qui a développé un véhicule précisément pour la course de côte et qui serait incapable de rouler dans d'autres disciplines pour des raisons de surchauffe, de quantité d'essence... T'arrives à avoir un véhicule ultra performant, mais tu le mettrais sur circuit, au bout d'un tour on serait sûrement très performant, mais on retournerait au stand attendre une demi-heure que ça refroidisse. C'est pas exploitable niveau endurance, mais pour des tracés de 7-8 km, il n'y a rien de mieux.
Ton plus gros coup de chaud sur une épreuve ?
Oh c'était plus qu'un coup de chaud... C'était un vrai accident. J'ai fait une erreur de pilotage qui a coûté cher, on a pris un mur de face, tout droit, et j'ai fait un stop sur une seconde de 115km/h à zéro. Le corps a pas trop aimé, la voiture encore moins. Pour autant, on a réussi à réparer la voiture dans la nuit, grâce à des collègues qui nous ont filé des pièces, et on est reparti le lendemain, moi j'avais la main cassée, avec une attelle. On a mis les gants par dessus, et ça allait comme si c'était tout neuf. Après, il y a eu plein de petits coups de chaud, mais qui se sont plutôt bien terminés.
A l'inverse, ta plus belle victoire ?
C'était celle où on a gagné la coupe des Nations. C'est l'épreuve mondiale des courses de côtes. J'avais eu cette chance d'être sélectionné en équipe de France en 2021, et on était la première équipe française à remporter cette épreuve, c'était au Portugal devant 100.000 personnes, c'était un spectacle de fou ! Un souvenir inoubliable. Tu as ta médaille d'or, t'as l'impression d'être aux JO, et ça c'était assez fou.
On parle maintenant de ton programme pour 2024...
On se prépare pour une très grosse année. On s'engage pour la première année en championnat d'Europe. On conserve la même auto que l'année dernière, la Revolt, mais on a fait quelques modifications pour l'adapter à la réglementation européenne. On va découvrir des concurrents, des courses, un championnat. On se lance dans le grand bain. On a pour rêve, et on travaille pour, de faire Pikes Peak, la course dans le Colorado. Les épreuves européennes, c'est la marche supplémentaire pour se rapprocher de ce but puisqu'on va passer sur des tracés plus longs, plus techniques et qui vont nous permettre de nous entraîner pour faire cette épreuve, et y être performant.
Pikes Peak, Sébastien Loeb l'a courue... On fait le parallèle avec le Sébastien Loeb Racing, un mot sur cette structure ?
J'ai eu l'opportunité complètement folle d'intégrer la structure, on parle quand même de la structure la plus performante et la plus connue de France, et en Alsace, le nom il sonne chez tout le monde. Quand t'as la confiance d'une structure pareille, ça m'a beaucoup crédibilisé dans mon métier de pilote de course automobile et ça permet d'avoir une approche technique exceptionnelle, d'avoir une aide au niveau de la gestion de la carrière aussi, puisqu'on a tendance à aller dans tous les sens. Quand on se lance de rien et qu'on a de belles opportunités, on a tendance à dire oui à tout. Et eux, ils me canalisent, ils me permettent de calmer le jeu et de me concentrer sur les objectifs qu'on a à terme. C'est une des chances de ma vie. Ils ont ma confiance, j'ai la leur, et on avance vite ensemble.
L'Alsace est une région très forte au niveau de la course automobile... Il y a de nombreux grands noms (Sébastien Loeb, Yvan Muller, Yann Ehrlacher, Bruno Spengler...). L'Alsace est sur-représentée, on va dire, niveau pilotage !
Je suis d'accord avec toi. On a une super belle région de sport automobile. La proximité avec l'Allemagne et ses nombreuses marques de qualité, ça aide, et on se rend compte qu'il y a beaucoup de gens qui aiment ça, qui aiment en parler. On se lance souvent dans de grandes discussions, il n'y a personne qui déteste ça, même si tout le monde n'est pas passionné. C'est vrai aussi que ça fait quelques années qu'on a quelques grands noms qui nous ont permis de faire connaître l'Alsace dans le monde entier. Forcément on a envie de poursuivre cette aventure. Il faut continuer cette lignée !
Les questions liées à l'environnement reviennent beaucoup. Qu'est-ce que tu peux nous dire comment se situe le sport auto aujourd'hui ?
J'ai envie de dire, il y a trois ans, ça a été l'année la plus compliquée, avec une prise de conscience assez extrême au niveau de l'écologie, où nous, pilote, on a eu beaucoup de mal à justifier ce qu'on faisait. Maintenant ça va mieux, tout le monde a changé un peu sa façon de voir : on a montré en tant que passionnés de sport automobile qu'on avait une vraie conscience aussi de ce qu'il fallait faire pour améliorer la situation. On travaille beaucoup dans ce sens. J'ai par exemple rejoint un mouvement qui s'appelle "Une victoire, un arbre", qui m'a permis de planter une vingtaine d'arbres déjà avec l'espoir d'en planter d'autres au nombre de mes victoires. On développe aussi les carburants qui nous permettrait à terme de continuer à travailler dans ce sens là, et je fais également quelques conférences sur l'impact du sport auto sur l'écologie. On a souvent tendance à pointer du doigt l'impact négatif alors que je pense que l'impact positif est largement supérieur. Je dirais que c'était un problème il y a quelques années, c'est devenu un peu différent, certaines personnes ont conscience qu'on participe grandement à ça.
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> La première manche du championnat d'Europe se déroulera du 26 au 28 avril à Rechberg, en Autriche.
Un tracé de 4,46 km, à 6,10 % de moyenne et une vitesse moyenne au-delà des 150km/h.