Pourquoi les pharmacies seront-elles fermées ce jeudi ?

29 mai 2024 à 10h35 - Modifié : 30 mai 2024 à 15h50 par Jade Poncet

Les syndicats estiment que 95% des pharmacies d'Alsace seront fermées le 30 mai
Les syndicats estiment que 95% des pharmacies d'Alsace seront fermées le 30 mai
Crédit : Wikimedia Commons

Beaucoup d’officines seront fermées en Alsace ce jeudi 30 mai en vue d’une mobilisation nationale des pharmaciens. Ils réclament une revalorisation financière mais veulent aussi alerter sur la pénurie des médicaments.

L’engagement est national. Toutes les officines françaises seront fermées ce jeudi 30 mai pour manifester l’inquiétude de la profession pharmaceutique face à la pénurie de médicaments, ou encore envers la possible mise en place d’une vente en ligne. En Alsace, les pharmacies du Bas-Rhin seront portes closes toute la journée tandis que celles du Haut-Rhin accueilleront malgré tout des clients le matin. Des pharmacies réquisitionnées resteront ouvertes selon les Agences Régionales de Santé. Une telle mobilisation du corps pharmaceutique n’avait pas eu lieu depuis 2014, année où 87% des officines avaient fermé pour lutter contre la possible vente de médicaments sans ordonnance dans les grandes surfaces. Dix pourcents des pharmacies françaises avait été réquisitionnées, ce qui fait un taux de mobilisation d’environ 97%.

Des revendications claires

Cette journée de mobilisation massive résulte d’un fort mécontentement des pharmaciens, initiée par les négociations avec la Caisse d’Assurance Maladie sur les conditions d’exercice et les rémunérations des professionnels. L’Union de Syndicats de Pharmaciens d’Officine (USPO) avait déjà appelé à la grève durant le week-end de la Pentecôte pour réclamer des aides financières, ce jeudi la mobilisation sera inédite. Selon la Fédération des Pharmaciens de France (FSPF), les propositions économiques faites ne suffisent pas à maintenir le réseau. « Le budget qui est sur la table ne permet pas de financer toutes les officines », expliquait le président de l’Association, Philippe Busset lors d’une conférence de presse.

Des difficultés à prendre en compte

Les pharmaciens d’officines veulent communiquer sur des difficultés qui s’intensifient. Premièrement, l’inflation qui touche de plus en plus les pharmacies françaises les obligent à fermer l’une après l’autre. Selon la FSPF, dans les 20 500 officines dénombrées en métropole, 300 ont dû mettre la clé sous la porte en 2023 et 46 depuis janvier 2024. Dans le Bas et Haut-Rhin, les habitants disposent de plus de 450 pharmacies dont 95% seront closes ce jeudi 30 mai, selon les syndicats. Un autre facteur entre en compte dans l’énervement des pharmaciens, celui de la pénurie croissante de médicaments. Depuis la crise sanitaire, la production a chuté et de nouveaux pays émergeants en réclament. Un autre problème, la France est un des pays d’Europe où les prix des médicaments essentiels sont les plus bas, les laboratoires privilégient donc la vente à des pays où la marge peut être plus élevée.  

La mise en place d’une vente en ligne 

Une autre difficulté s’ajoute à la survie des officines, la possibilité d’un projet de loi visant à autoriser la vente de médicaments en ligne. Fin janvier, le Premier ministre Gabriel Attal a dit vouloir lancer un « projet de loi au printemps pour déverrouiller certaines professions, comme la vente en ligne de médicaments par les pharmacies », une volonté qui a provoqué le « ras-le-bol » de la profession. Selon eux, le gouvernement s’attaquerait à un des piliers du modèle de la pharmacie d’officine : celui du monopole qui veut que seul un pharmacien en pharmacie puisse vendre des médicaments. Cela pourrait aussi amener à la disparition des officines de proximité, d’où vient plus de 80% de la vente de médicaments en moyenne. Un dernier point fait débat : le temps de livraison qui laisse penser que l’on recevra les médicaments après en avoir eu besoin.

Une mobilisation soutenue par les étudiants

Les étudiants en pharmacie vont également participer à la mobilisation et défileront dans la rue ce jeudi 30 mai. Ils attendent la mise en œuvre de la réforme du troisième cycle promise par le gouvernement il y a sept ans et qui implique une revalorisation des indemnités de stage. Le passage de cette réforme devrait revaloriser l’attractivité de la filière qui a du mal à recruter. Les places de la Faculté de Strasbourg sont toutes pourvues mais ce n’est pas le cas partout en France : selon l’Association nationale des étudiants en Pharmacie, ce sont plus de 400 places qui étaient encore disponibles en première année à la dernière rentrée universitaire. La responsable de l’Association amicale des étudiants en pharmacie de Strasbourg, Delya Ghoul, affirme que « les étudiants soutiennent et rejoignent les mobilisations prévues ce jeudi ». 

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Plusieurs manifestations sont prévues en Alsace. Le cortège partira de la Place Broglie à Strasbourg à partir de 14h, un autre du Square de la Liberté à Mulhouse à partir de 13h45.