Stocamine : vers une extraction des déchets ?
Publié : 30 octobre 2024 à 10h57 - Modifié : 4 novembre 2024 à 7h47 par Sébastien RUFFET
Les interventions au fond de l'ancienne mine sont de plus en plus dangereuses
Crédit : @MDPA
Fin 2023, le gouvernement avait adopté pour un confinement définitif, avant d'être retoqué par le conseil constitutionnel. Ce mardi 29 octobre 2024, on a appris qu'un amendement déposé par quatre députés alsaciens avait été adopté, dans le sens, cette fois, d'un nettoyage en profondeur de l'ancien site Stocamine de Wittelsheim, lourdement pollué, notamment au mercure.
Est-ce enfin le début d'une solution ferme et définitive ? La question des déchets toxiques de l'ancienne mine de sel et de potasse de Wittelsheim est renvoyée de préfets en ministres, d'Assemblée en commissions. 42000 tonnes qui dorment au fond des galeries, dont 19000 de déchets problématiques à base de mercure, de chrome, d'arsenic ou d'amiante. Rapide retour historique sur ce site malgré lui emblématique de l'industrie en Alsace.
Les ressources
Outre de la potasse, on trouve dans le sol de Wittelsheim du phosphore, du soufre ou encore du baryum, utiles à la fabrication d'engrais minéraux. Le sol, sous une épaisse couche de sel, est jugé stable et épargné par les infiltrations d'eau. De bonnes conditions pour creuser une mine en somme.
Les débuts
A l'origine, il y a un puits creusé par les Allemands en 1911, qui permettra de commencer l'extraction de la potasse dès 1913. Ce puits Joesph-Else est repris en 1918 par la MDPA (Mine de Potasse d'Alsace), qui va développer l'activité avant d'y mettre un terme en 1966. Le site est reconverti en parc d'activité avant de reprendre sa fonction en 1990 quand Stocamine, qui gérait les déchets les plus dangereux, installe un nouveau chevellement métallique. Le site est classé aux Monuments Historiques avant d'être désinscrit en 2006 faute d'entretien !
Stocamine
La société Stocamine avait pour but de traiter les déchets toxiques (amitante, mercure...) à partir de 1991, notamment en les enfouissant, alors que l'activité de la mine devait se poursuivre. Stocamine devait en quelque sorte archiver les déchets enfouis, avec une traçabilité de chaque lot. L'entreprise a fermé ses portes en 2014, avec une perte de près de 65M€.
L'incendie
Le 10 septembre 2002, des produits chimiques entrent en réaction et un important incendie se déclenche dans le bloc 15. Dans des conditions très compliquées, les pompiers trouvent une solution : étouffer le feu par manque d'oxygène. Le bloc est complètement confiné, mais les déchets continuent de brûler jusqu'à extinction des flammes. Ce n'est que le 21 novembre que le sinistre est jugé "maîtrisé". Les galeries de sel sont largement contaminées à leur tour, ce qui engendre des milliers de tonnes de déchets supplémentaires à traiter.
Des fûts sont en train de plier sous la pression / @MDPA
Les décisions politiques
Entre études, rapports et comités de pilotage, il faut attendre 2012 pour que le Préfet du Haut-Rhin, Alain Perret, annonce un destockage partiel qui viserait les déchets les plus toxiques, pour un montant de 100M€. En 2016, la Préfecture autorise le "stockage illimité", à l'exception de quelques déchets mercuriels. Le collectif Destocamine accuse le ministre de l'Ecologie Nicolas Hulot de ne pas prendre ce dossier au sérieux. Nouvelle série d'études et de rapports. En 2019, l'Etat annonce que les 42000 tonnes de déchets resteront finalement enfouies à tout jamais. En janvier 2021, la ministre de la transition écologique Barbara Pompili va à l'encontre des élus locaux et confirme qu'il n'y aura pas d'extraction des déchets, alors que des inquiétudes grandissantes planent sur une pollution à long terme de la nappe phréatique d'Alsace. Des actions en justice de la Collectivité Européenne d'Alsace, puis de l'Etat, continuent de retarder les décisions, alors que l'état de la mine se dégrade à vue d'oeil. En janvier 2023, le tribunal administratif de Strasbourg va à l'encontre de l'Etat.
Les derniers revirements
En septembre 2023, dans la lignée de ces prédecesseurs, Christophe Béchu, le ministre de l'Ecologie, informe les élus locaux que les travaux de confinement vont débuter et qu'ils devront être terminés au plus tard en 2027. Mais en décembre, le conseil consitutionnel retoque la mesure à l'étude du projet de loi de finance. Le dossier est un peu mis de côté, mais quatre députés alsaciens, Emmanuel Fernandes (LFI), Thierry Sother (PS), Sandra Regol (EELV) et Hubert Ott (Modem), soumettent un amendement en ce mois d'octobre 2024, demandant, cette fois, l'extraction de l'ensemble des déchets. Un amendement adopté, et qui ouvre la porte à un nouvel épisode, et peut-être à une fin définitive dans ce dossier qui traîne depuis trop longtemps.
L'enveloppe estimée à 456M€ engloberait le destockage, le nettoyage du site, le traitement des déchets ainsi que toutes les opérations d'entretien du site.
L'amendement déposé par les députés alsaciens