L’agriculture biologique espère sortir de la crise
7 mars 2024 à 9h23 - Modifié : 8 mars 2024 à 10h28 par Jules Scheuer
Depuis la crise sanitaire du Covid-19, l’agriculture biologique connaît une période compliquée de son histoire. Pourtant, depuis le début du mouvement de contestation agricole en début d’année, la culture bio n’a pas vraiment fait partie des débats. Au Salon de l’Agriculture, la filière a donc tenté de se faire entendre.
En Alsace, l'agriculture biologique fait partie du paysage depuis un bon moment. Mais depuis quelques années, le bio à l'échelle nationale connaît quelques turbulences. « Je pense enfoncer des portes ouvertes en disant que l’agriculture biologique rencontre des difficultés. On est en décroissance sur tous les secteurs du bio depuis 2021 maintenant » : Pauline Maupu, responsable filière et impact pour Les Prairies Bio tire la sonnette d’alarme au Salon de l’Agriculture le jeudi 29 février. Depuis la sortie de la crise sanitaire, la filière vit une période difficile avec des prix de vente en baisse et des consommateurs au pouvoir d’achat amoindri, qui se détournent de ses produits. Cette situation « entraîne des difficultés pour les producteurs qui sont en bas de la chaîne, qui ont beaucoup investi, fait beaucoup d’efforts pour se convertir et qui ont aujourd’hui du mal à écouler et à valoriser leur marchandise au juste prix », ajoute-t-elle.
"Les signaux ne vont pas tous dans la même direction"
La filière estime que les aides financières ne sont pas à la hauteur de l’ampleur de la crise. « Je pense que ce qu’il faut surtout apporter, c’est de la visibilité sur le long terme et une cohérence complète entre les différences instances publiques ». La loi EGalim a par exemple fixé à 20% la part d’alimentation biologique dans la restauration collective, réclamant un certain rythme de production. « Mais en parallèle, il y a une baisse des aides au niveau de la PAC. Les signaux ne vont pas tous dans la même direction et surtout, il y a beaucoup d’incertitudes sur l’avenir », déplore Pauline Maupu.
Cette situation délicate pour la filière a déjà sonné le départ de certains agriculteurs biologiques vers une agriculture conventionnelle. « Aujourd’hui, on fait plus du bio par conviction que par intérêt. Ceux qui le faisaient par profit ont déjà arrêté et sont repartis en conventionnel », assène Frédéric Luzon, agriculteur bio de vaches laitières et à viande en Arriège. Selon lui, la filière sait exactement ce dont elle a besoin pour rester à flots. « On a déjà identifié quelles sont les sommes qu’il faut mettre pour soutenir l’agriculture biologique, de manière à ce que dans trois ou quatre ans, quand le bio ira mieux, on ne soit pas obligés de remettre de l’argent pour reconvertir des fermes. Si on pouvait maintenir un niveau de production linéaire, ça permettrait de limiter toute cette fluctuation. »
Manger bio, « une question de priorité »
Au-delà des difficultés liées à l’agriculture, le grand public a parfois tendance à se détourner de l’agriculture biologique et de ses prix, jugés trop chers en période d’inflation. « C’est une idée reçue ! », s’exclame Pauline Maupu. « L’agriculture biologique pâtit énormément de l’image qu’elle a. Mais tout est une question de choix. Consommer bio ce n’est pas forcément plus cher : en faisant des choix sur la composition de son assiette, en passant par moins d’intermédiaires, on peut manger bio au même prix. Il y a un vrai travail de communication, à faire. » Pour Frédéric Luzon, la question est ailleurs. « C’est plutôt une question de priorité. Quel argent veut-on mettre dans notre nourriture ? Est-ce qu’on veut le mettre pour bien manger ou est-ce qu’on veut le mettre dans un téléphone ? »
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