Retraites : "Il va falloir que le gouvernement entende ce qui se passe dans la rue"
Publié : 7 mars 2023 à 14h55 - Modifié : 8 mars 2023 à 12h28 par Sébastien RUFFET
Un mardi noir, c'est ce que voulaient les syndicats pour cette 6e journée de lutte contre le projet de réforme des retraites. Entretien avec Yannick Lefébure, secrétaire général adjoint Force Ouvrière du Bas-Rhin.
Top Music: Avez-vous le sentiment qu'il s'agit là de la plus grosse mobilisation depuis le début ?
Yannick Lefébure, secrétaire général adjoint Force Ouvrière du Bas-Rhin : Je dirais que c'est un nouveau point d'étape puisque jusqu'ici les journées "saute-mouton" n'ont pas eu l'effet escompté. On s'en doutait un petit peu à Force Ouvrière. On savait que ça allait épuiser le moral et les finances des camarades. Et malgré tous ces millions de gens dans la rue, le gouvernement n'a pas infléchi son projet de réforme sur les retraites. Donc aujourd'hui, je dirais qu'on entame une nouvelle étape : on a lancé un préavis de grève reconductible dans énormément de secteurs d'activité, que ce soit les transports, l'énergie, l'éducation, aujourd'hui on sent une détermination sans nom et il va falloir que le gouvernement entende ce qui se passe dans la rue, sinon cela va avoir des conséquences démocratiques terribles.
Quand vous entendez "on peut manifester mais pas bloquer le pays", ça vous hérisse le poil ?
Bien entendu. Les personnes qui bloquent le pays aujourd'hui ne sont pas du côté des salariés et des manifestants. Si on est dans cette situation, c'est parce qu'on n'a pas été entendus pendant des mois et des mois. Nos représentants nationaux ont participé à des échanges. Ils n'ont jamais été entendus. Ce projet est parti de l'Assemblée pour arriver au Sénat sans être infléchi. Aujourd'hui on entend qu'il va se droitiser encore plus, mais qu'est-ce que ça veut dire ? Avec tous ces millions de personnes qui se sentent méprisées dans la rue, dire que se sont les salariés qui défendent leurs droits qui bloquent le pays, c'est du mépris et une insulte à tous ces salariés. Ils veulent juste un horizon de paix sociale et de vie tranquille pour leurs retraites.
Des contre-propositions ont été faites dans ce projet de réforme...
On sait très bien que ce n'est pas un problème de déficit, puisque même les rapporteurs du COR (Conseil d'Orientation des Retraites, ndr) disent que le déficit qui est annoncé et martelé dans les médias n'est que temporaire, et sans aucune réforme, sans rien faire, on va revenir à un régime d'équilibre dès 2025. Donc vous voyez bien que les objectifs sont au-delà de ce qui se passe dans les médias. On n'est pas dupe et on va se battre jusqu'au bout pour préserver ces acquis d'après-guerre qui sont ultra importants pour nos anciens et pour nos jeunes.
Les débats se poursuivent en parallèle au Sénat, vous suivez ce qui s'y passe ?
Bien sûr, on est très attentifs, parce qu'on sait qu'au Sénat, il y a une politique de droite qui est majoritaire, et on craint fortement ce qui va sortir de ce texte qui est parti de l'Assemblée et qui nous inquiétait déjà ! On sent qu'il va y avoir un coup supplémentaire porté, notamment aux salariés des régimes spéciaux, parce qu'ils ont envie de faire exploser la "clause du grand-père" : on met en place une réforme pour les jeunes entrants, et on écarte ceux qui sont sous un statut particulier. Là, les débats portent sur le fait que ça va pas assez vite sur les régimes spéciaux. Si les régimes spéciaux sont en place, c'est qu'il y a une bonne raison qu'ils soient en place ! Et la réponse doit être immédiate. Parce que si aujourd'hui on estime entre deux et trois millions de salariés dans la rue, il va bien falloir à un moment donné pour ces politiques qu'ils entendent ces personnes qui les ont portés au pouvoir.
----------
Tous les syndicats ont répondu à l'appel / @TopMusic - SR